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Catéchèse sur la confirmation

PETIT EXPOSE SUR LA CONFIRMATION

 

 

            Les théologiens sont bien embarrassés pour définir la confirmation dans la logique occidentale. On sait qu’elle est un complément du baptême, mais on ne voit pas ce qu’elle y ajoute. On a même entendu des prêtres dire que s’ils étaient honnêtes, ils ne devraient pas donner la confirmation, car ils ne savent pas ce que c’est.

            On a toujours mis la confirmation en rapport avec la Pentecôte et le don de l’Esprit Saint. Et on voit tout de suite l’objection: on est baptisé au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, donc on reçoit l’Esprit Saint dés le baptême. Que peut donc apporter de plus la confirmation?

            Pourtant dans les Actes des Apôtres, on voit que ceux-ci, apprenant que des Samaritains avaient reçu le baptême des mains du diacre Philippe, envoyèrent Pierre et Jean. Ils prièrent pour les Samaritains, afin qu’ils reçoivent l’Esprit Saint; ils leur imposèrent les mains, et les Samaritains recevaient l’Esprit Saint (Actes 8). Et par la suite, l’Eglise a toujours retenu cette prière et cette imposition des mains comme un complément indispensable et distinct du baptême.

            Proposons tout de suite une triple réponse: la confirmation, c’est la Pentecôte de chaque chrétien; la confirmation, c’est le sacrement de la croissance spirituelle; la confirmation, c’est le sacrement de l’appartenance totale à l’Eglise.

 

 

LA PENTECÔTE DU CHRETIEN

 

Le baptême et la confirmation des Apôtres

            Pour commencer, on peut demander aux enfants quand les Apôtres ont été baptisés. On les entend parfois répondre: ils ont été baptisés par Jean-Baptiste. C’est pourquoi il faut avoir bien distingué auparavant le baptême de Jean de celui que Jésus confie à son Eglise: les effets n’en sont pas du tout les mêmes.

            Les enfants ont bien des raisons de ne pas savoir répondre. Car apparemment les Apôtres n’ont jamais été baptisés explicitement « au nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit ». En fait, puisque le baptême nous fait passer par la mort et la résurrection de Jésus, les Apôtres ont reçu leur baptême en participant à la Pâque de Jésus. En voyant leurs espérances humaines détruites par la mort du Seigneur, ils mourraient avec lui. En admettant peu à peu ce qu’est la résurrection, ils devenaient dignes de voir le Ressuscité et en le voyant, ils ressuscitaient à une espérance nouvelle.

            De même on peut demander aux enfants quand les Apôtres ont été confirmés. Cette fois ils vont sans doute répondre: les Apôtres n’ont pas été confirmés autrement qu’en participant à la Pentecôte. Jésus avait prié son Père pour que l’Esprit Saint leur soit envoyé; une fois passé de ce monde à son Père, il envoya avec lui l’Esprit Saint sur ses Apôtres. Il faut d’ailleurs remarquer que cela peut s’appliquer aussi aux autres disciples qui avaient suivi Jésus jusqu’à Jérusalem.

            Pour savoir ce que la confirmation produit dans l’âme du chrétien, il suffit de voir ce que la Pentecôte a apporté aux Apôtres et aux disciples. En quelque sorte, de même qu’au baptême on se comporte comme le Christ s’est comporté en son sacrifice, ainsi à la confirmation on se laisse transformer comme les disciples à la Pentecôte.

 

L’assurance dans la foi

            Avant la Pentecôte, les Apôtres avaient déjà reçu le Saint Esprit. C’était au soir de Pâques; Jésus souffle sur eux et leur dit: « Recevez l’Esprit Saint. » Pourtant ils avaient encore peur des Juifs après cela. Pendant cinquante jours ils vont parler de Jésus ressuscité seulement à ceux qui avaient été du groupe des disciples auparavant.

            Puis tout à coup ils reçoivent l’Esprit Saint de façon publique. Et aussitôt ils sortent de la maison où ils étaient enfermés, et s’adressent à toute la foule accourue au bruit. Ils n’ont plus peur. Leur foi était profonde, réelle, mais comme sans force extérieure. Dieu aurait pu donner cette assurance dés le début; mais il voulait manifester que la force du témoignage vent de lui. Cette force ne vient pas d’une construction humaine, même fondée sur le don du baptême. Elle vient de ce qu’on sait que Dieu, qui nous donne la foi mystérieusement, peut la communiquer aussi aux autres. Les Apôtres ne cessent pas de penser que les Juifs peuvent leur faire du mal; simplement cette pensée ne les arrête plus.

            Or cette force dans la foi ne s’exerce pas seulement face aux difficultés rencontrées dans la société où l’on vit et où l’on annonce le Christ. Elle s’exerce dans toutes les épreuves de la vie normale: maladie, incompréhensions, travail, etc. Elle nous est  donnée pour que ces épreuves ne fassent pas sombrer notre foi, mais l’approfondissent en nous unissant davantage au Christ dans sa passion et sa résurrection.

 

LA CROISSANCE SPIRITUELLE

 

Une dynamique dans la durée

            La Pentecôte a rendu la foi des Apôtres forte et mûre. On peut donc dire que la confirmation est le sacrement qui fait mûrir notre foi. Cette maturation ne doit pas être comprise comme un fait passager. Elle dure toute notre vie. La croissance spirituelle n’est pas faite sur le modèle de la croissance physique. Celle-ci s’arrête à la fin de l’adolescence. Celle-là ne cessera jamais: la Bible nous présente l’union à Dieu comme des fiançailles éternelles. La confirmation nous engage dans un processus de renouvellement perpétuel de l’amour.

            N’allons pas croire que ce soit une remise en cause permanente des acquits précédents. Cela n’a rien à voir avec la révolution permanente. Celle-ci veut faire « du passé table rase »; il s’agit là de détruire le passé, parce que le poids de l’histoire serait une entrave au progrès. La croissance spirituelle au contraire détruit bien progressivement ce qui en nous s’oppose à l’union à Dieu; mais elle construit toujours sur ce qui nous a déjà été donné. En particulier, notre personnalité a été voulue par Dieu, notre âme a été créée volontairement. La grâce qui grandit en nous vient révéler ce que nous sommes en profondeur.

 

L’âge de la confirmation

            L’usage traditionnel était de confirmer aussitôt après le baptême. C’est ce qui se passe encore aujourd’hui pour les adultes. Et en Orient, on continue à confirmer les petits enfants dans la même cérémonie que celle de leur baptême.

            Aujourd’hui, l’Eglise en Occident admet depuis peu deux pratiques différentes pour les enfants baptisés dés après leur naissance. Elle prévoit qu’au choix des évêques, la confirmation pourra leur être donnée soit à l’âge de raison, comme c’était l’habitude, soit à un autre moment. Pratiquement, beaucoup d’enfants d’Europe reçoivent la confirmation à l’adolescence.

            Cette pratique récente, pour licite qu’elle soit, ne va pas sans problèmes. Il n’est pas sûr que la période la plus troublée de l’existence soit la meilleure pour recevoir consciemment la grâce de la confirmation. Au contraire, beaucoup de parents souhaiteraient que leurs enfants reçoivent la force du Saint Esprit avant d’affronter les déséquilibres de l’adolescence. Pour les pasteurs s’ajoute une autre question, lancinante: a-t-on le droit de baptiser des enfants, avec les engagements que cela implique, alors qu’on sait qu’ils n’auront pas toutes les grâces nécessaires pour tenir ces engagements?

            Car la confirmation retardée risque bien d’être réservée à une élite: celle dont le milieu familial est suffisamment fort pour résister aux pressions de la société qui a tendance à éloigner les adolescents de la pratique religieuse. Et lorsque l’institution familiale est faible et que l’école est aux mains des impies, cela mène à la catastrophe. On devrait réserver la confirmation tardive aux sociétés saines où la proportion d’enfants baptisés qui reçoivent la confirmation sera satisfaisante. Au moins devrait-on proposer aux parents, premiers responsables de l’éducation, de faire confirmer leurs enfants plus tôt, du moment que ceux-ci sont capables d’expliquer à leur niveau les rudiments de la foi.

            Mais là où cette réforme a été introduite par les mêmes cercles qui prétendaient refuser le baptême aux petits enfants, elle est nécessairement suspecte. De plus, elle apparaît comme le reflet de l’activisme occidental, où l’homme veut se construire par lui-même, sans référence à Dieu. Dans l’Eglise même des tendances se sont fait jour qui donnent la priorité à la planification pastorale sur l’action de Dieu.

 

Profession de foi et sacrement

            L’Eglise dispose que les confirmands doivent être capables de rendre compte de leur foi. C’est pourquoi on fait souvent précéder la confirmation d’une profession de foi dans la même cérémonie. Du coup on a tendance à considérer que dans la confirmation, le baptisé confirme lui-même son baptême. On ne comprend plus alors pourquoi les Orientaux confirment les petits enfants juste après leur baptême.

            C’est qu’un sacrement est toujours un don de Dieu. Professer la foi catholique est une condition pour recevoir avec fruit la confirmation, ce n’est pas la confirmation. Le mot « confirmer » signifie renforcer: on y retrouve l’adjectif « ferme ». C’est Dieu lui-même qui vient renforcer la grâce qu’il a donnée au baptême.

            Ajoutons que là où une cérémonie spéciale existe pour la profession de foi, il est désastreux d’en faire rédiger le texte par les enfants. La foi est donnée par Dieu, le contenu en est transmis par l’Eglise; ce n’est pas le fruit de la réflexion des individus ou des communautés particulières. Il faut donc partir du texte du je crois en Dieu, et s’attacher à l’expliquer aux enfants. Au besoin on peut leur faire proposer leurs propres explications, mais toujours en les confrontant à la foi de l’Eglise.

 

Le caractère

            En schématisant, on peut dire que la confirmation tient en ceci. L’évêque impose les mains sur les confirmands. C’est le geste traditionnel de bénédiction chez les Juifs, qui a été utilisé par Jésus pour bénir ses disciples. C’est comme si l’on disait: ma force s’exerce à travers le travail de mes mains, les mains d’un serviteur de Dieu peuvent donc servir à transmettre la force de Dieu.

            En même temps qu’il impose les mains, l’évêque prononce une prière qui peut se résumer ainsi: « Dieu et Père de Jésus, que ton Esprit repose sur tes enfants comme il a reposé sur Jésus... » Puis il donne à chacun une onction du saint-chrême, une huile qu’il a bénie pendant la Semaine Sainte; au même moment il dit: « Sois marqué de l’Esprit Saint, le don de Dieu. »

            C’est cette marque de l’Esprit Saint qui constitue le « caractère » de la confirmation. Comme le caractère du baptême, il est indélébile. Cette marque nous prédispose à la vie éternelle en Dieu. Elle est indispensable à une vie chrétienne normale.

 

 

LE RATTACHEMENT A L’EGLISE

 

            Une des grandes différences entre le baptême et la confirmation, est que dans le premier le chrétien passe où le Christ est passé, en son sacrifice; tandis que dans la seconde, le chrétien passe où l’Eglise est passée, en sa Pentecôte. C’est pourquoi la confirmation a pour effet propre de rattacher davantage le fidèle à l’Eglise où son baptême l’a fait entrer.

 

La Pentecôte, naissance de l’Eglise

            Car avant la Pentecôte, chaque disciple de Jésus avait avant tout conscience de suivre le Christ, mais pas tellement de faire partie de la communauté de ceux qui avec lui, suivait Jésus. C’est comme si Jésus avait voulu monter au ciel avant la Pentecôte, afin que ses disciples se rendent mieux compte de cet effet de la présence du Saint Esprit parmi eux: il fait d’eux une communauté en les unissant à Dieu le Père, tout en approfondissant leur lien avec le Fils.

            La Pentecôte est donc considérée à juste titre comme le moment de la naissance visible de l’Eglise, même s’il faut dire qu’elle est déjà en gestation à partir de la conception immaculée de la Vierge Marie.

            Celle-ci d’ailleurs joue un rôle de premier plan à la Pentecôte. Etant jeune, elle avait prié comme tous les Juifs pour que le Sauveur promis soit envoyé en Israël, et cette prière avait été décisive pour la venue du Fils de Dieu. De même, elle a prié avec les Apôtres pour que le Consolateur promis leur soit envoyé, et cette prière a été décisive pour la venue de l’Esprit Saint. Si bien que Marie, à bon droit considérée comme la Mère du Christ, tête de l’Eglise, a été proclamée par le Pape Paul VI à non moins juste titre comme la Mère de l’Eglise, qui est le corps du Christ.

            Marie a donc un rôle particulier dans l’insertion de chacun de nous dans l’Eglise. Aussi, comme il est bon de consacrer à Marie les nouveaux baptisés, il faudrait confier explicitement les nouveaux confirmés à la Mère de l’Eglise.

 

L’enseignement de Pierre

            Sans la confirmation, nous serions des individualistes de la foi. Ceux qui comme les protestants pensent que chaque chrétien doit interpréter la Bible selon ce que l’Esprit Saint lui dirait sans tenir compte de l’Eglise, sont aussi ceux qui pensent que la confirmation n’est pas un sacrement.

            Or nous voyons au contraire que dés la Pentecôte c’est Pierre qui prend la parole au milieu des Apôtres. Jusque là ils se disputaient pour savoir qui était le plus grand. Après, ils n’ont plus ce souci. Ils peuvent discuter sur leurs points de vue divergents, mais s’en remettent en définitive à l’avis de l’Eglise exprimé par Saint Pierre. On le voit dans l’attitude de Saint Jacques au Concile de Jérusalem. Et si Saint Paul s’oppose un jour à Saint Pierre, c’est au nom de la sentence de Saint Pierre dans ce concile.

            Saint Pierre donc prêche au jour de la Pentecôte. C’est la première fois que l’Eglise parle de sa propre autorité au nom du Christ. Jusque là, les Apôtres partis deux par deux ne faisaient que répéter les paroles de Jésus aux Juifs. A partir de la Pentecôte ils doivent l’adapter à un public cosmopolite.

            Ceux que les circonstances ont amené à donner un enseignement neuf savent par expérience ce qui se passe ensuite: on a tendance à reprendre toujours les mêmes schémas d’explication. On peut penser que c’est ce qui est arrivé à Saint Pierre. Et les autres Apôtres, ensuite, ont marché dans ses traces. On n’a pas forcément besoin d’une autre explication pour la ressemblance des trois premiers évangiles, dits synoptiques: on ne se prêche pas soi-même, on proclame l’enseignement de l’Eglise, l’enseignement de Pierre. Un confirmé se sent lié par l’enseignement du Pape, le successeur de Pierre.

 

Le ministre du sacrement

            Pour souligner ce rattachement du croyant à l’Eglise par le sacrement de confirmation, revenons à ce qui est arrivé dans la primitive Eglise. En Samarie, des gens baptisés par les diacres ont été confirmés par les Apôtres.

            Depuis lors, c’est l’évêque lui-même qui donne la confirmation. Si un prêtre la donne, c’est avec une délégation expresse de l’évêque. C’est pourquoi les protestants, même s’ils voulaient avoir la confirmation, ne le pourraient pas, puisqu’ils n’ont pas d’évêque.

            Ainsi, par le ministre du sacrement de la confirmation, le confirmé sait qu’il n’est pas seulement le membre d’une communauté locale qu’un simple prêtre se constituerait à la dimension de sa seule personnalité; le confirmé fait partie de l’Eglise diocésaine et par là de l’Eglise universelle.

 

Confirmer les ermites

            On a parfois voulu ces dernières années réserver la confirmation aux fidèles qui ont un « engagement ». Mais c’est faire consister la vie chrétienne dans la seule activité apostolique. Or la vie chrétienne est d’abord une vie d’union à Dieu. Tous ne sont pas appelés à une vie active. L’église exige par exemple qu’on soit confirmé avant de prononcer ses voeux dans une communauté religieuse contemplative. Et l’on confirme les ermites!

            Il serait dommage de limiter la confirmation au rôle de sacrement de l’action catholique. En revanche, il paraîtrait utile de proposer un rituel liturgique pour l’entrée dans les mouvements d’apostolat. Ils y gagneraient en cohésion communautaire. De plus un tel rite favoriserait chez eux un retour à une vie de prière plus intense, afin qu’on n’ait plus à entendre la remarque de Paul VI, en sa dernière adresse à des évêques français, sur « la curieuse évolution de certains mouvements d’action catholique ».

            Il faut faire preuve d’imagination dans ce domaine, comme l’Eglise l’a fait autrefois. Pour ceux qui se dévouaient à la défense de la chrétienté, elle avait mis au point le sacramental de l’adoubement. En dépendance de la confirmation, il peut toujours être reçu avec profit par ceux qui ont vocation d’étendre à toute la société les bienfaits de l’évangile.

 

A bord du B.C.R. Somme,

entre Mascate et Koweit.

Septembre 1998.

 

 

Voir aussi : L'Esprit Saint dans la Bible

 

et : Sermon sur la Trinité - avec textes du Magistère



13/04/2020
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