Le progressisme, une croyance naïve
Le progressisme, une croyance naïve
A l’origine du progressisme, on trouve l’extraordinaire développement scientifique et technique, qui s’est accéléré à partir de la Renaissance en Europe, qui augmente même de façon exponentielle aujourd’hui partout dans le monde. On a cru longtemps que ce progrès serait infini et de toute façon bénéfique. Mais on a dû déchanter : on se souvient que dans les années d’après la seconde guerre mondiale l’invention de la matière plastique ou du nylon, par exemple, étaient des avancées magnifiques, mais à présent on voit que ce sont des poisons si on les utilise massivement comme on l’a fait jusqu’à ces derniers temps : non seulement le progrès matériel n’est pas infini, mais il peut être à lui-même sa destruction ! Et les ressources naturelles n’étant pas elles-mêmes infinies, le progrès matériel lui-même est limité, même si l’on trouve d’autres ressources, énergétiques ou autres.
Cependant cette croyance s’est vue renforcée par la croyance en l’évolution des espèces. Là encore cela repose sur une constatation : la terre a porté des êtres vivants de différents niveaux de complexité, et de notre point de vue humain, de plus en plus perfectionnés. Cela véhicule, sans qu’on en soit bien conscient, l’idée que cette évolution ne cessera pas. De plus, puisque l’homme se voit au sommet de ce processus, il se croit en devoir de l’accélérer, en transformant la nature et même en se transformant lui-même. A nouveau, on découvre une limite : de même que certaines choses considérées comme des progrès se sont révélées néfastes, ainsi rien ne prouve que la modification de l’homme par l’homme ne sera que bénéfique, bien au contraire !
Ajoutons que certaines formes de racisme trouvent leur origine dans la croyance en l’évolutionnisme : il y aurait ainsi des races plus avancées que d’autres dans l’échelle de l’évolution !
Un troisième facteur est venu renforcer ces deux premiers éléments, c’est la révolution : on raconte qu’on est passé de l’obscurantisme à la lumière. Encore une fois nous sommes en présence d’une croyance naïve, et même d’un mensonge. L’Ancien Régime n’a pas été une période obscurantiste, puisqu’il a vu les débuts des progrès dans l’agriculture, l’industrie, la science, etc. Mais ceux qui se disent révolutionnaires estiment être à la pointe du progrès de l’humanité, se sentent un devoir de révolutionner le monde, de détruire tout ce qui s’oppose à leurs théories. Mais qui ne voit que c’est précisément cette mentalité qui est à l’origine du colonialisme de la deuxième moitié du XIXème siècle ? En France, vers 1880, les socialistes héritiers de la révolution disaient qu’ils avaient des devoirs vis-à-vis des « races inférieures » : c’était leur façon de parler. Même si la colonisation a permis à certains peuples de faire en trois générations le chemin que les peuples colonisateurs avaient fait en trois millénaires, la brutalité de certains colons ou administrateurs est à mettre au compte du progressisme ainsi conçu.
Car il ressort de ce qui précède que les progressistes pensent que leurs adversaires n’ont aucun autre droit que ceux que le rapport de forces oblige à leur reconnaître. Il faudrait donc être « de son temps », « dans le vent » (de l’histoire !) – mais Gustave Thibon faisait remarquer qu’être dans le vent c’est une ambition de feuille morte…
De tout cela il suit que la nouveauté devrait nécessairement être considérée comme bonne, meilleure que ce qui a précédé. Gare donc à celui qui est « en retard !
Et au plan religieux, demandera-t-on ? Certains teilhardiens outranciers ont voulu que le progrès spirituel soit en continuité avec le progrès matériel : ce serait le fruit de l’évolutionnisme naturel ! On perd de vue l’originalité du spirituel. La religion elle-même doit être changée. Mais pour le christianisme il est impossible de changer ce qui a été institué par le Christ, le Fils de Dieu.
Or certains veulent qu’on s’adapte aux idées du monde moderne et de son matérialisme jouisseur. C’est le contraire de l’imitation du Christ, qui invite ses disciples à prendre leur croix pour marcher à sa suite. On a vu par exemple certains aumôniers de jeunes, dans les années 1960, dire que certaines normes de l’Eglise dataient d’une époque où les gens étaient pauvres, mais que dans l’abondance actuelle il ne fallait plus parler du conseil évangélique de pauvreté. Mais précisément les limites du progrès font qu’il est nécessaire de restreindre ses désirs. Et la pauvreté volontaire (qui n’est pas la misère !) est le meilleur rempart contre la ploutocratie actuelle.
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