Épreuve
Il sera question ici de l’étymologie et du sens du mot épreuve, ainsi que de la valeur spirituelle de la réalité qu’il désigne.
Éprouver vient du latin probare. Dans ce mot, la syllabe pro, qui est d’ordinaire un préfixe signifiant « en avant », semble bien être simplement le radical. On trouve la même chose dans le mot prora, qui signifie la proue, l’avant d’un bateau. Éprouver veut donc dire mettre en avant, manifester. Lorsqu’on éprouve un matériau, on en fait ressortir les qualités. Ainsi l’épreuve est un évènement qui permet à celui qui la subit de manifester qui il est.
Deux attitudes sont possibles face à l’épreuve : ou bien la refuser et même s’insurger, et on manifeste alors sa mauvaise qualité ; ou bien l’accepter et, en la prenant de façon positive, s’améliorer. J’ai entendu parler d’un homme qui avait refusé de montrer son billet de train au contrôleur : il venait de connaître une certaine promotion sociale, et paraissait estimer indigne de lui d’être contrôlé. Alors qu’on doit prendre le contrôle comme une occasion de manifester son honnêteté…
Dès lors, quand on parle d’épreuve en spiritualité, c’est Dieu qui nous éprouve. Il nous donne une occasion de manifester notre fidélité dans l’amour. L’épreuve ainsi comprise se présente sous la forme d’un événement ou d’une situation qui risque d’ébranler notre relation à Dieu : soit notre foi, soit notre espérance, soit en tous cas notre charité. La persévérance dans l’épreuve vient donc non seulement manifester la qualité de nos vertus théologales, mais aussi elle les renforce.
L’épreuve surmontée apparaît donc doublement comme une grâce : d’abord parce qu’elle vient renforcer notre union à Dieu ; ensuite parce que c’est Dieu lui-même qui par sa grâce nous a donné la force de la surmonter. L’épreuve est occasion de grâce. On peut donc dire que Dieu nous soumet à l’épreuve. On ne saurait souhaiter les difficultés, mais quand elles se présentent il faut les affronter avec reconnaissance envers Dieu dans sa Providence.
Mais l’épreuve doit être soigneusement distinguée de la tentation, même si celle-ci est l’occasion d’une épreuve. Même si tentare peut être presque synonyme de probare, comme on le voit dans le mot « tentative », la tentation est comprise en français comme une incitation au mal. On ne peut donc absolument pas dire que Dieu nous soumet à la tentation. C’est pourquoi on ne pouvait admettre l’ancienne traduction du Notre Père où l’on trouvait la phrase « ne nous soumets pas à la tentation » : cela impliquait que Dieu pouvait avoir l’idée ou l’intention de nous soumettre au mal ! Ce qu’il faut demander, c’est de ne pas « entrer dans » la tentation, c’est-à-dire de ne pas consentir à sa logique.
En définitive, une épreuve surmontée victorieusement est quelque chose qui nous unit au Christ victorieux de la tentation au désert, au Christ victorieux de la mort, du péché et de Satan par son obéissance sur la croix et sa sortie du tombeau.
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