César l'Africain
Texte envoyé à la revue " La Nef " et partiellement publié en courrier des lecteurs (mars 2006).
Professeur au petit séminaire de Bukavu (Congo ex-Zaïre) dans les années 1980, j’ai découvert l’Afrique Noire tout en enseignant le latin. Cela m’a conduit aux réflexions suivantes.
D’abord, les initiateurs de la colonisation de la fin du XIXème siècle avaient à peu près tous fait du latin et donc étudié César. Consciemment ou non, ils ont cherché à reproduire ce modèle. On sait les bienfaits de la colonisation de la Gaule par les Romains. Mais comparée à la violence de la conquête par César (un million de morts ou déportés, sur un total de cinq à six millions d’habitants), la pénétration des Européens en Afrique dans cette période a largement mérité son nom de " pacification ". Toutefois, Romains et Gaulois avaient de communes racines culturelles indo-européennes. Au contraire, la radicale différence des civilisations africaines a empêché la plupart des Européens d’en percevoir immédiatement la richesse.
Par ailleurs, le mot colonisation recouvre deux réalités liées mais qu’il faut distinguer : la présence européenne en Afrique, d’une part, et la forme administrative qu’elle a prise, d’autre part. En plus de l’écriture, la présence européenne a introduit dans des populations qui les ignoraient des techniques comme la roue, la traction animale, la force motrice de l’eau et du vent, sans parler de l’industrialisation. Celle-ci est arrivée trop vite pour que l’apprentissage des forces physiques soit assimilé par les peuples concernés.
Ces bienfaits eurent leurs contreparties, notamment le bouleversement trop rapide des valeurs traditionnelles. Mais la colonisation comme forme administrative a permis de limiter les aspects négatifs, en introduisant notamment le droit du travail, en supprimant l’esclavage, etc. Sans cette colonisation d’Etat, les prédateurs auraient fait de l’Afrique un immense camp de concentration, auquel n’auraient échappé que les zones tenues par des missionnaires.
Mais s’il est vrai que la colonisation a fait cesser les guerres tribales, elle a eu l’inconvénient d’impliquer l’Afrique dans la première guerre mondiale. Cependant, ce n’est pas l’un des moindres mérites de l’armistice de 1940 d’avoir évité la pénétration nazie en Afrique Noire. La participation des troupes coloniales à la lutte contre le racisme est à mettre à l’actif de la colonisation.
Une dernière précision : on trouve des prises de position du Magistère à propos de la colonisation dans certains textes concernant la Mission. Saint Pie X, si j’ai bonne mémoire, voulait que les missionnaires soient des apôtres de l’évangile et non des agents de leurs pays d’origine.
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